Vous le savez certainement mais, au quotidien, je porte plusieurs casquettes (professionnelles, mais pas seulement) : je suis 1/ auteure ; 2/ traductrice littéraire ; 3/ thésarde ; 4/ chargée de cours à la faculté.
Ces casquettes, évidemment, je ne les porte pas tous les jours ni en même temps ; autrement, je ne pourrais rien accomplir, jamais avancer, et la charge de travail serait insupportable. Mais même en expliquant ceci, la question qui revient, c’est : mais tu ne dors jamais, ou quoi ?
Si, si, minimum 8 heures par nuit. C’est d’ailleurs une de mes règles d’or : toujours bien dormir, et jamais de travail après 20h. Sinon, c’est bien simple : je ne tiens pas le coup, ni physiquement ni nerveusement ! ^^;;;
Le repos, donc, c’est la première condition sine qua non du travail. Étrange, de commencer par là, non ? (mais pour une migraineuse comme moi, essentiel : la semaine dernière, j’ai trop tiré sur la corde, mal dormi, et voilà, week-end en mode migraine…)
Bon. Maintenant, je vais sortir le 2e argument qui choque : je travaille rarement plus de six heures par jour, cinq jours par semaine.
Si, si.
Et tout avance.
Juste : jamais en même temps 🙂
Par exemple, en ce moment, je mène de front, dans cet ordre de priorité : les traductions ; les cours ; la thèse. Pas trop les romans, ou alors seulement le weekend et, surtout, seulement si j’en ai envie 🙂
Dans cet article – et de manière un peu décousue j’en ai conscience –, je vais tenter de vous expliquer comment je fonctionne, avec une méthode qui me ressemble, chaotique et adaptable, que j’ai pompeusement appelé « la méthode 3.2.1. » ! Évidemment, ça n’est pas une méthode universelle, ni un remède miracle – ça ne vous empêchera pas d’aller traîner sur Facebook, mais ça pourra vous aider à amener un peu de structure dans un emploi du temps chaotique et toujours changeant… comme le mien, quoi ! 🙂
Première étape : la priorité et la nécessité
La première étape, essentielle, consiste à déterminer ce qui est prioritaire dans votre emploi du temps (sur un mois, par exemple). Pour ma part, vu que j’ai des activités plus ou moins rémunératrices, aux paiements plus ou moins réguliers, et que j’ai des factures qui tombent, elles, régulièrement et sans faille, j’ai décidé de procéder simplement : je privilégie ce qui paie le mieux mes factures.
Par ordre de priorité économique, donc, ça donne : 1/ la traduction (je suis payée à la tâche, je rend un document par mois à divers éditeurs, ce qui m’assure un revenu régulier) ; 2/ les cours (je suis payée une fois par semestre) ; 3/ la thèse (malheureusement, il y avait 2 contrats doctoraux à distribuer, et j’ai fini… 3e sur 15 demandeurs, sisisi, la rage x’)).
Comme dit plus haut, ce classement est temporaire : il est défini par l’urgence du mois/du moment, ce que j’appelle ici la nécessité. Il est nécessaire que j’accomplisse telle ou telle chose ce mois-ci ? Ça va dans ma liste de 3 choses prioritaires à faire !
J’ai plus de 3 choses prioritaires à accomplir ce mois-ci ?
J’organise un roulement ! 🙂
A plus de 4 priorités par mois, je vous conseille d’envisager de passer les tâches supplémentaires sur le mois suivant, si vous le pouvez : on n’a que 4 semaines dans un mois, et sept jours par semaines – cinq, quand on se prend aussi des week-ends, parce qu’il ne faut pas abuser, hein…
Deuxième étape : fragmenter et répartir
Imaginons que j’aie un roman à finir de traduire, soit 150 000 signes ce mois-ci. Je ne vais pas me fader tout ça sur une seule semaine. Je calcule mon rythme idéal : 150 000/4 = 37 500 secs. Problème, je dois compter la relecture. Bon, pas grave, on arrondit à 45 000 secs par semaine… pour relire les 10 derniers jours du mois. En gros, ça fait 9000 signes par jour, cinq jours par semaine : parfaitement réalisable et beaucoup moins effrayant !
Pour la direction éditoriale, pareil, j’ai divisé en calculant combien de pages je devais idéalement relire et corriger par jour, puis j’ai étalé ça sur le nombre de jours disponibles.
Pour les cours, j’ai des horaires imposés, qui rognent sur mes journées du mercredi et du jeudi, à des heures évidemment très mal placées… du coup, je sais que le mercredi et le jeudi, je ne peux pas traduire, par exemple.
Pour la thèse, j’en fais un peu tous les jours. En ce moment, je ne peux pas écrire de nouvelles pages, mais j’ai d’autres tâches : relire un bouquin, faire un dossier de demande de financement, envoyer des mails, corriger tel ou tel bout de chapitre, fignoler une transition… bref, je ne manque pas de travail quand même, et j’avance sur ce que je peux faire, une petite chose après l’autre !
Donc, pour résumer :
1/ la traduction les lundi, mardi et vendredi ;
2/ les cours les mercredi et jeudi ;
3/ la direction éditoriale ;
4/ la thèse un peu tous les jours.
Un beau bordel, quoi.
Je ne sais pas vous, mais moi, j’ai besoin d’horaires, de structure. C’est là que j’ai commencé à m’inventer ma méthode, la (bien nommée, je vous l’assure ^^) 3.2.1.
Troisième étape : appliquer et s’y tenir
Sous le pompeux nom de « méthode 3.2.1 » se cache un principe très simple. Je divise ma journée en trois périodes, 1 de 3 heures ; 1 de 2 heures ; 1 de 1 heure.
Pour la période de 3 heures, je case LA grosse priorité, LE boulot qui me prend du temps, et de l’énergie, et dont la réalisation ne souffrira pas d’être interrompue. J’ai, pour ma part, choisi de caser cette tâche gourmande en temps et en énergie le matin, quand je suis la mieux réveillée, la plus alerte et, aussi, motivée.
Pour la période de 2 heures, je prends une tâche également longue, mais un peu moins gourmande en créativité – plus mécanique, moins « réflexive ». Moins intense, aussi. J’ai choisi pour ma part de caser cette période après le repas du midi.
Pour la période d’1 heure, je prends les petites tâches « en plus », celles qui mises bout à bout demanderaient un temps fou mais qui, réparties sur la semaine, font que ça va mieux. Qu’on souffle. C’est souvent mon « heure soupape » et déculpabilisante (vous allez comprendre pourquoi en lisant la suite ^^).
Comme une démonstration vaut mieux que 50 explications, je vous montre mon emploi du temps de cette semaine (et, à dire vrai, des semaines précédentes, depuis mi-janvier pour être exacte ^^) :
Lundi
3h le matin sur la traduction (15k secs) ;
2h l’après-midi sur de la relecture de manuscrit pour un éditeur ;
1h sur des tâches liées à la thèse/au doctorat (envoi de mails, préparations de copies, articles, consultation de documents, orga de colloques, etc.)
Mardi
3h le matin sur la traduction (15k secs) ;
2h l’après-midi sur de la relecture de manuscrit pour un éditeur ;
1h sur des tâches liées à la thèse/au doctorat (envoi de mails, préparations de copies, articles, consultation de documents, orga de colloques, etc.)
Mercredi
3h de cours : le matin de 9h30 à 11h et l’après-midi de 14h30 à 16h ;
2h de relecture de manuscrit pour un éditeur ;
1h de gestion administrative liée aux cours.
Jeudi
3h de « travail éditorial divers » : j’ai le droit de bosser un peu sur mes propres projets, d’avancer sur diverses choses… bref, c’est ma journée « joker » (parce que OUI, il en faut une) ;
2h de cours de 10h30 à 12h30 ;
1h de tâches liées à la thèse
Vendredi
3h le matin sur la traduction (15k secs) ;
2h l’après-midi sur de la relecture de manuscrit pour un éditeur ;
1h sur des tâches liées à la thèse/au doctorat (envoi de mails, préparations de copies d’articles, consultation de documents, etc.)
Samedi-dimanche : repos !
Si je dois « bourrer », je bourre mes journées de la semaine.
Le weekend, c’est famille et repos. Je ne m’autorise que des « boulots » sur lesquels j’ai très envie d’avancer, pour le plaisir, pas par obligation (même si, dans ma semaine de boulot, je prends aussi beaucoup de plaisir à bosser sur plein de trucs, mais ce n’est pas pareil ^^).
Au total, j’avance de :
* 3×15 000 secs en moyenne, soit 45 000 secs par semaine sur ma traduction en cours (ce qui est bien, même si, parfois, j’y passe un peu plus de 3 heures par jour : tout dépend de la difficulté du passage, évidemment, et ce n’est que du premier jet, je tiens à le préciser !…) Les semaines où je fais moins, ben, je fais moins, et puis voilà… je ne cherche pas à boucler ces 45K secs à tout prix : juste à être régulière pour prendre le moins de retard possible.
* 4x2h sur le travail éditorial du moment, un manuscrit d’une auteure que je corrige pour une ME : j’avance généralement de 15 à 20 pages par session (parfois moins, ça dépend). Donc potentiellement 60 pages par semaine.
* j’avance de manière non quantifiable sur la thèse : je ne perds pas le fil, et les tâches urgentes (organisation de colloques, mails, veille documentaire, etc.) sont suivies.
La semaine prochaine, j’aurai des copies à corriger : ça remplacera la dernière heure, voire débordera un peu de mes six heures minimale et « essentielles ». C’est le roulement dont je parlais plus haut ; ne pas tout faire en même temps.
Six heures, ça paraît peu, mais c’est suffisant en étant bien concentré et efficace.
Et ça permet de caser tout le reste : rdv médicaux, rdv pro, repas avec des amis le midi…
Quatrième étape : recommencer !
A partir du mois prochain, je n’ai plus cours 🙂
Donc le contenu de mon emploi du temps va changer… pas ma méthode d’organisation ! Et c’est ça, que j’aime bien, avec cette méthode toute bête : c’est une structure au format « Lego » ou, pour ainsi dire, Tetris : ça s’imbrique là où on veut, comme on veut !
Probablement que ma tâche des 3h restera la traduction, mais celle des 2h deviendra la thèse ! ^^ Ou l’inverse, si je veux avancer plus vite sur ma thèse (ce qui est fort probable, là que j’y pense, d’autant que j’aurais moins de quantité de traduction à rendre le mois prochain, je crois, je n’ai pas encore vérifié…) (enfin, j’y réfléchirai en fin de mois ! Là, je me concentre sur les priorités du moment).
La clé: savoir (s’)adapter…
C’est la clé, et quand on déborde de boulot, eh bien… savoir que l’essentiel est accompli en 6 heures, c’est rassurant. On sait que, quoi qu’il arrive, on aura été productif sur l’essentiel.
Oui, parfois, je bosse plus de six heures : là, aujourd’hui, je me suis fait une belle journée de 9 heures par exemple, mais arrivée à 6h de travail, je savais que les tâches prioritaires et nécessaires n’étaient plus à faire, et j’ai pu me concentrer sur les imprévus qui me sont tombés dessus cette semaine, sans culpabiliser ni (trop) paniquer ^^.
Je sais que, demain, je vais donc éviter de dépasser mes 6 heures minimales, afin de ne pas craquer avant vendredi 😉 Et, surtout, afin d’avoir assez d’énergie pour rester concentrée au mieux sur le travail que j’effectue pendant ces 6 heures quotidiennes, 5 jours par semaine : parce que plus on est épuisé, plus on met de temps à se concentrer et moins on est efficace…
Pour conclure…
Donc voilà le pourquoi du comment du « 3.2.1. » Vous savez tout, maintenant 🙂
Si vous avez des réflexions à partager sur cette « méthode » (qui est juste un découpage un peu amélioré, au final), n’hésitez pas à commenter ci-dessous ^^ Je prends toutes les propositions d’amélioration et d’essais !
J’arrive 30 ans plus tard mais en tout cas c’est très intéressant comme technique ! Merci du partage ^^ En tout cas chapeau, ça demande une bonne organisation de mener tout cela de front et surtout une sacré dose de motivation et de discipline ! Le résultat est indéniable, ça fonctionne du tonnerre pour toi, bravo ^^ Et c’est très important en effet de se dégager du temps pour soi et le repos, ce qui est toujours difficile à faire quand on travaille chez soi et/ou que l’on est autoentrepreneur.
Par curiosité, tu peux dire pour quel éditeur tu fais de la direction éditorial ou c’est confidentiel ?
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Je suis très impressionnée par cette organisation ! Je ne pourrais pas la suivre à cause du boulot, dont les horaires me sont imposés, du lundi au vendredi. Mais ça fait réfléchir !
Mira
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